L’ambiance : Marseille, sa corniche, ses habitants à l’accent chantant, son soleil éblouissant et son mistral saisissant… Au centre du tumulte de la Cosmopolite, le chef Gérald Passédat a repris l’affaire de famille qui trône au bout d’un rocher depuis trois générations. C’est son grand-père qui achète cette villa en 1917, il y ouvre une auberge baptisée « Le Petit Nice », depuis l’amour des produits iodés et des choses bien faites s’est transmis du fils, Jean-Paul au petit fils, Gérald.
Aujourd’hui, Relais & Château avec ses suites délicates, « Le Petit Nice » est un havre de paix posé en face de la Grande Bleue, on y accède au bout d’une (très) étroite ruelle et on s’y baigne au pied du rocher !
La salle à manger est tout de baies vitrée(s) et offre une vue panoramique sur l’anse de Maldormé qui abrite la villa. Assis à notre table, on devine le Château d’If et les îles sauvages au large de Marseille, les rayons de la lune se reflètent sur la mer et les vaguelettes viennent chatouiller les cailloux de l’hôtel ! Tous à bord, le capitaine Passédat peut lever les voiles et nous emmener plonger au cœur de ses fonds sous-marins…
On y va pour ?
Goûter la cuisine iodée de Gérald Passédat ! Passé par les cuisines du Bristol, du Crillon, chez Troisgrois et chez Guérard, le chef Passédat 3e du nom a trouvé sa signature culinaire en retournant à ses racines : la mer Méditerranée. Si elle est difficile à dompter, il en a fait son terrain de jeu, elle l’inspire et il la sublime, lui donne ses caractères de noblesse. Pour le récompenser de ses efforts, elle lui apporte même la 3e étoile du Guide Rouge, celle qui manquait à la famille.
Pour découvrir sa cuisine, nous optons pour le menu Passédat : 5 possibilités de décliner les merveilles de la Méditerranée sans compter l’avant-goût et les douceurs…
Mettons en jambe nos papilles par un explosif tartare de seiche délicat et citronné, si c’est culotté de commencer aussi fort en bouche, cela a au moins l’effet d’être marquant ! Suivront des beignets de loup à « trempoter » dans une émulsion de ciboulette, un morceau de liche cru juste caramélisé avec de la noix râpée « on the top » et un couteau mariné au citron vert, céleri branche et paprika, une dernière ouverture amère et très iodée que seuls les vrais amateurs de la mer pourront apprécier !
Pour entrer dans le vif du sujet, arrive une déclinaison de sashimis : 5 morceaux de pélamide et 1 de mulet fumé… Le poisson cru est servi sur de jeunes pousses de poireau, un acidulé de betterave et une huile d’olive citronnée, un équilibre des saveurs parfait pour mettre en valeur la finesse de la chair de ce poisson ! Une bouchée moelleuse tout en fraîcheur !
Vient ensuite un plat que toute la stratosphère des gourmets rêve de goûter un jour : le loup de Lucie Passédat. Un hommage savoureux à sa grand-mère et à ce poisson-star (aussi appelé Bar sous d’autres latitudes). Magnifiquement cuit à la vapeur, le beau tronçon de loup est paré de rubans colorés de courgettes et de concombres, puis déposé sur une sauce vierge puissante : tomates vertes et rouges, citron, basilic, coriandre, fenouil sauvage, huile d’olive et pointe de truffe… Le résultat ? Un plat comme on mange rarement, un moment où le temps d’une bouchée, tout s’arrête : la chair onctueuse du bar, les saveurs marines et terriennes qui s’entremêlent… un plat d’une simplicité et d’une efficacité remarquable. Inoubliable (sans parler de cette crème de courgette, râpée de truffe noire qui l’accompagne).
Alors forcément, après ce moment magique, difficile de repartir ! Ce qu’arrive à faire le chef avec une daurade grillée sur la peau puis cuite à basse température accompagnée de son fenouil sauvage rôti et de son jus et d’une déclinaison de champignons, cèpes et coulemelles… Là encore, la justesse de la cuisson et l’accord terre-mer sont saisissants !
Vient un autre plat signature de Passédat : l’anémone. Il la cuisine en beignet et en royale et c’est peut-être le plat le moins accessible et celui qui m’a le moins convaincu. En précisant pour être totalement honnête, que je ne suis pas une grande amatrice d’huîtres, crustacés et autres coquillages étranges en provenance de la mer… Alors oui, la vision de l’anémone quand je porte la première bouchée de mon assiette à mes papilles me hante. Mes amis autour de la table, eux se régalent !
Et pour terminer ces recettes poissonnières, une déclinaison de la fameuse bouillabaisse : Sar, dorade et raie, pomme de terre safranée et bouillon de roche. Un concentré de cuisine méditerranéenne, du soleil salé en une bouchée ! Note à moi-même : retourner chez Gérald pour manger sa Bouille Abaisse !
Nous vous épargnerons le fromage pour passer directement aux gourmandises ! D’abord une mousse de thé Earl Grey et sa boule de glace au beurre salé puis la chrysalide de caramel au chocolat, un magnifique accord entre l’amère du chocolat, le rond du caramel et l’acide de la soupe de mangue et du parfait à l’orange. Une réussite gourmande et fraîche pour clôturer un dîner fort en émotion !
Carnivore dans l’âme, la peur de manquer de « vraie chair » me terrassait l’estomac en arrivant chez Passédat. Le loup de Lucie dévoré, la dorade fenouillère engloutie… cette angoisse s’est évanouie ! A travers ces 5 déclinaisons iodées, Passédat donne l’impression de réinventer la mer et nous plonge le temps d’une soirée à 20 000 lieues sous les mers pour nous faire découvrir des richesse de la Grande Bleue trop souvent inexploitées. Un voyage culinaire à recommander !
Avec qui ? Des gens particuliers.
Le bonus : Les cocktails à déguster en début de soirée et les menus dédicacés par Gérald himself !
Le point noir : Le concept est clivant : pas de viande servie à table, uniquement des poissons… traduction : si tu n’aimes pas les produits de la mer, passe ton chemin.
Le prix : Le menu Passédat : 230€ le soir (375€ avec l’accord mets-vins).
Où ?
Le Petit Nice
17, rue des Braves,
13007 Marseille.